Roger Picon
Histoire d'Antoine Martinez, 06
obscur "poilu" mort pour la France
Sidi-bel-Abbès, 26 juillet 1892
Wischaëte (Belgique), 6 novembre 1914
Ce 11 Novembre, j’assistais à la cérémonie qui marquait les 90 ans de l’armistice. Je n’y vais jamais mais cette année, quelque chose de diffus m’a poussé à faire acte de présence. Les autorités se sont exprimées par la vois de Monsieur le Maire. Le Président de l’Association des Anciens combattants a pris la parole, Un message du Secrétaire d’Etat à la Défense et aux anciens combattants a été lu par Monsieur le Maire. Le Souvenir Français a fait entendre sa voix. Quarante-quatre bougies, une par mort de le commune de Cabestany, ont été disposées devant le monument aux morts. L’émotion était grande et la Marseillaise entonnée par les enfants des écoles mettait une touche cocardière à cette belle manifestation d’unité nationale. Personne, même par la voix de Monsieur le Secrétaire d’Etat à la Défense et aux Anciens Combattants qui a relevé la participation des chinois, n’a parlé des ces morts « honteux ». Cette cérémonie qui n’avait pas reçu la consécration télévisuelle a dû se répéter de la même façon dans chaque commune de France où s’élève un monument aux morts.
Je ne conçois pas qu’il en soit autrement quand on mesure la somme des drames qu’a provoqué chaque annonce de la mort d’un enfant du pays. Le déchirement des mères, femmes ou enfants des rives sud de la grande bleue n’ont pas été moindre que celui des mères, femmes ou enfants de la Métropole.
Mais le temps a passé. Tous les rescapés sont morts à leur tour. Dans chaque commune, les descendants des disparus se retrouvent chaque année et par leur présence, maintiennent en vie les fantômes dont les noms couvrent la stèle. Les pauvres loques, restes des soldats venus de l’autre bord de la Méditerranée n’ont pas droit qu’ « à leur cercueil, la foule vienne et prie ». Leur corps est là, quelque part sous la terre des champs de bataille, mais leur âme en est absente. tournez la page