Ecritures de Sidi Bel Abbès
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Les joutes avaient lieu au Camp des Spahis, vaste plaine de terre rouge, parfaitement dégagée de tout obstacle. Là s’affrontaient des dizaines d’esquifs aériens pendant les vacances. La bataille pour la conquête de l’azur était âpre car de l’ascension maximum dépendait la considération des copains qui traînaient là en spectateurs avisés. Ils sollicitaient le maintien du fil pendant quelques minutes pour juger de la stabilité de l’appareillage et lâchaient des avis définitifs: « Il n’a pas assez de queue, il ne tire pas bien. » Il ne restait plus qu’à rembobiner pour apporter les modifications souhaitables !
La « lune » regagnait enfin sa place dans le firmament et on pouvait lui faire parvenir des « télégrammes » Ces petits papiers, installés sur le rail du fil, grimpaient plus ou moins vite vers les nuages et témoignaient ainsi de la force des vents.
« Les pignols » ou noyaux d’abricots servaient de matière première au jeu de prédilection de l’été. Jalousement collectionnés dans de lourdes chaussettes usagées, ils permettaient de jouer au « petit tas » ou à « la maison Pichpinette » Le petit tas se composait d’une base de trois pignols surmontés d’un quatrième servant de cible.
Postés à trois mètres de là, les amateurs essayaient d’atteindre la pyramide à l’aide de leurs noyaux personnels ; ils les abandonnaient à l’organisateur du jeu en cas d’échec ou remportaient le « petit tas » en prime si celui-ci s’affaissait sous l’effet d’un tir ajusté !
La maison Pichpinette ou boite à chaussures posée contre un mur, dans le sens de la hauteur, faisait aussi appel à l’adresse des joueurs. En façade, elle offrait des trous au passage de leurs projectiles, avec des gains plus ou moins substantiels suivant le diamètre choisi. Gagner les vingt pignols promis par l’orifice le plus petit était une gageure : le diamètre était si étroit que, même à cinq centimètres, le passage éventuel n’était dû qu’à un hasard bienveillant
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Le Tour de France cycliste avait généré un parcours dessiné sur le sol, sous forme de ruban. Les Bartali et autres Fausto Coppi faisaient avancer leur capsule de canette de bière d’une chiquenaude, en s’efforçant de ne pas sortir des limites de la « route » sous peine de revenir au point de départ. Ce passe-temps ne m’attirait pas vraiment pas plus d’ailleurs que les véritables courses cyclistes comme le Critérium de l’Echo d’Oran tant prisé par l’oncle Joseph.Tournez la page
Jean-Pierre Covès : Carapoutchétés et maison Pichpinette 2/3