Michèle Garcia-Kilian : mon enfance au soleil, Sidi-bel-Abbès ou des vacances heureuses
Souvenirs de Sidi-bel-Abbes
Cette population si profondément solidaire, liée par sa foi collective en ses héros et en cette ville d’Afrique dont le cœur battait à l’unisson de la France, avait effacé ses dissemblances originelles. Dans les veines de chacun courait le sang de ses lointains ascendants européens ou africains, aux origines culturelles et traditionnelles distinctes. Mais le contexte historique et géographique avait créé, dans ce pays neuf, un amalgame exceptionnel de traditions arabo-judéo-chrétiennes, qui avait donné naissance à une culture, un mode de vie, je dirais même un art de vie original et unique. Chacun y trouvait son compte, dans le respect de l’autre et dans l’épanouissement collectif de cette société particulière.
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Je vivais heureuse à Oran. Pourtant la perspective des vacances m’excitait. Régulièrement, dès que nous avions quelques congés, la ‘’micheline’’ familière qui nous accueillait à la gare, en haut du Plateau Saint Michel, tout près de chez nous, nous transportait, mes parents, mon frère et moi, vers la grande aventure bel-abbèsienne.
Dans notre famille, nous avions coutume de dire que nous étions tous nés dans le même berceau : celui de la Légion Etrangère. Car la grande fierté des bel-abbésiens était la Légion, et la ville vivait au rythme de ces beaux étrangers au képi blanc, venus de tous les horizons, créateurs de la cité aux prémices de la colonisation, et qui servaient la France avec passion. LA ‘’complainte du boudin’’ était l’hymne bel-abbèsien, et les fêtes du Camerone étaient les plus belles de l’année. Elles commémoraient l’héroïsme des légionnaires pendant la campagne du Mexique. Ce jour là, les rues prenaient leur parure de fête, les magasins fermaient leurs portes, et la population se pressait pour acclamer après la grandiose prise d’armes, ses ‘’légionnaires.
La gare d'Oran en 1961, photo Frédéric Ruelle
Prise d'Armes glacis nord, photo Kepi Blanc, special sept 1979