Je vivais heureuse à Oran. Pourtant la perspective des vacances m’excitait. Régulièrement, dès que nous avions quelques congés, la ‘’micheline’’ familière qui nous accueillait à la gare, en haut du Plateau Saint Michel, tout près de chez nous, nous transportait, mes parents, mon frère et moi, vers la grande aventure bel-abbèsienne.
Dans notre famille, nous avions coutume de dire que nous étions tous nés dans le même berceau : celui de la Légion Etrangère. Car la grande fierté des bel-abbésiens était la Légion, et la ville vivait au rythme de ces beaux étrangers au képi blanc, venus de tous les horizons, créateurs de la cité aux prémices de la colonisation, et qui servaient la France avec passion. LA ‘’complainte du boudin’’ était l’hymne bel-abbèsien, et les fêtes du Camerone étaient les plus belles de l’année. Elles commémoraient l’héroïsme des légionnaires pendant la campagne du Mexique. Ce jour là, les rues prenaient leur parure de fête, les magasins fermaient leurs portes, et la population se pressait pour acclamer après la grandiose prise d’armes, ses ‘’légionnaires.