Leurs cheveux s'enroulent dans des foulards richement brodés. Elles ont, sur les hanches et sur les épaules, des châles de couleurs précieuses. Des bijoux sans beauté véritable et des ceintures finement ouvragées les parent. Tout à coup, stridente, aiguë, surhumaine, une musique éclate. Dans le fond de la pièce, des joueurs de khaïta et de derboukha se démènent. Du tambourin, un martellement régulier, sourd, profond, vous tombe sur le cœur. D'une flûte part un son frémissant qui obsède, irrite. Les nerfs se nouent. première répulsion surmontée, on se laisse conquérir. La musique entre en nous, court avec notre sang. Elle ne fouette pas, elle ne fait pas bondir, comme la musique nègre. Non. Elle n'a pas tant d'ardeur. Elle vous prend, vous roule dans son rythme, elle vous étourdit et vous met dans un léger état d'hypnose. Lorsqu'on s'arrache à l'orchestre, il faut se soustraire à un autre envoûtement : Celui de la danse.
Une femme s'est levée soudain. Toute droite au milieu de la piste minuscule, elle s'offre au regard.
Il faut s'habituer avant de découvrir un charme à cette étrange harmonie. Puis, la C'est une belle fille, bâtie pour l'amour, pulpeuse comme un fruit mûr, à la peau blonde comme un rayon de soleil, à la chair drue. Ses seins sont lourds, sa taille fine. De ses prunelles sombres monte un regard qui vient du plus
profond d'elle-même et que les hommes reçoivent en pleine chair.