Souvenirs de Sidi-bel-Abbès
Extraits de la Vie parisienne 1936, AMOURS de LEGIONNAIRES 8/18 par Michèle de Nicole

L'amour... L'amour qui mène le monde... pour lequel tant d'êtres se ruinent, souffrent, meurent... L'amour pour lequel tant d'existences dévient de leur courbe normale... L'amour qui n'est que douceurs, tendresses, rêveries... L'amour fait d'une multitude d'impondérables... L'amour qui est plus qu'un acte : une fatalité, née de très loin, une force vivante qui s'oppose à la mort, à la tristesse... L'amour qui est la vie elle-même ! C'est au Village Nègre qu'on vient chercher tout cela. Les hommes se croisent, s'interpellent, les femmes rient... Toutes les folies et tous les désirs se frôlent... Les idiomes, nés dans les cinq parties du monde, s'entrecroisent... « lich liebe dich », « Te szeretem », « I love you », « Jog alskar tig ». « Sze agapô », « Te quiere », « Ja vas volim », « lo vi ama »... On doit dire aussi « Je t'aime ». La nuit mauve est déchirée par des cris. Des appels s'entre-mêlent, des injures retentissent, des bouts de refrain vous gifflent.

Les maisons basses semblent accroupies au sol comme par un besoin de stupre... Devant les portes ouvertes, des femmes attendent, Arabes pour la plupart. Derrière elles, on aperçoit une chambre, une natte, une lumière tremblottante...Même si elles ne sont pas belles elles possèdent ce charme des courtisanes orientales. Visages tatoués, yeux cernés de koheul, cheveux passés au henné. Des bracelets très lourds ceignent leurs pieds et leurs mains. Des boucles d'oreille immenses tombent jusqu 'à leurs épaules avec des mèches de cheveux lisses, ointes de parfums agressifs. Elles sont vêtues de robes larges, de coloris voyants. Elles zézaient en parlant et un sourire éblouissant brille dans leur face couleur d'or clair. Des couples enlacés passent, indifférents à tout ce qui n'est pas eux. tournez la page

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