Souvenirs de Sidi-bel-Abbès
Extraits de la Vie parisienne 1936, AMOURS de LEGIONNAIRES 7/18 par Michèle de Nicole
Pour toujours.Il répète après moi : — Pour toujours...Ses yeux, très allongés, laissent filtrer un regard bleu et cruel. Il a des cheveux invraisemblablement blonds, couleur de miel, et des dents éblouissantes, une carnation exquise, une carrure impressionnante. Il a l'air d'un jeune dieu, d'un être de la mer... Il fait sensation.— C'est Hans, dit François. Hans me salue en souriant, mais je lis dans ses yeux une haine insensée. Je ne peux oublier ce qu'a dit tout à l'heure mon voisin... — Après, on choisit... C'est donc, là, le choix de François ? Avec quelles armes vais-je lutter ? Un désir fou me prend de l'étreindre, de me coller à lui, de chercher l'arc sanglant de sa bouche... Il lit le désir dans mes yeux et se trouble. — Viens, dis-je, partons...— Comment ? Déjà ? s'exclame Hans. Oh ! François, j'avais envie de passer la soirée avec toi. — Impossible, dit François.
Hans nous quitte, il va à une autre table et nous l'entendons rire nerveusement... comme une fille... Nous partons. Un ciel de fête, qui a accroché toutes ses étoiles, baigne mon visage heureux. Je sais que dans quelques instants j'entendrai ces mots merveilleux qu'il ne m'a pas dit encore : — Je t'aime !
5. - LE VILLAGE NÈGRE
IL est là, imprévu, en marge de la ville européenne. Il s'étale comme un chancre. Il éclate, il hurle, il gémit. Il dit son angoisse, ses désirs, sa passion. C'est un dédale de rues étroites, tortueuses et mal pavées. Une odeur vous saisit à la gorge, vous empoigne et ne vous lâche plus. Elle commence une griserie à laquelle il est impossible de rester insensible. Parfum de la nuit africaine, touffeur d'humanité chaude, relents d'épices et de fards inconnus. Chaînon de lumières irrégulières, grouillement d'êtres humains qui prennent l'allure de fantômes. Grouillements de toutes les voluptés, de toutes les ivresses. Chaque maison est une maison d'amour. Des noms lumineux indiquent le chenal, le port,l'aboutissement de tous les rêves.Ici, à chaque porte, le songe vient cogner... C'est l'antre de l'amour.
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IL est là, imprévu, en marge de la ville européenne. Il s'étale comme un chancre. Il éclate, il hurle, il gémit. Il dit son angoisse, ses désirs, sa passion. C'est un dédale de rues étroites, tortueuses et mal pavées. Une odeur vous saisit à la gorge, vous empoigne et ne vous lâche plus. Elle commence une griserie à laquelle il est impossible de rester insensible. Parfum de la nuit africaine, touffeur d'humanité chaude, relents d'épices et de fards inconnus. Chaînon de lumières irrégulières, grouillement d'êtres humains qui prennent l'allure de fantômes. Grouillements de toutes les voluptés, de toutes les ivresses. Chaque maison est une maison d'amour. Des noms lumineux indiquent le chenal, le port,l'aboutissement de tous les rêves.Ici, à chaque porte, le songe vient cogner... C'est l'antre de l'amour.
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