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Adieu à Bel Abbès 09/13 par Georges Blond
(extrait du n° special d'Historia consacré au 150ème anniversaire de la Légion étrangère)
Mais d'autres retenaient l'attention. Le pourcentage de ceux-ci variaient selon les jours, atteignant un maximum le jour du prêt. (paie du 2ème classe)
On voyait le légionnaire titubant s'approcher du quartier de dix à vingt minutes avant l'heure réglementaire et s'appuyer à la grille, à une quinzaine de pas de la porte, pour reprendre des forces. Les dernières minutes étaient les minutes de vérité.
Rassemblant son énergie, titubant encore, l'homme s'avançait jusqu'au milieu de la porte, mais sans entrer. On le voyait alors se raidir, muscles des mâchoires contractées. Il franchissait la porte et marchait vers l'adjudant, en ligne droite, anormalement droit, anormalement rigide, se mettait au garde-à-vous, saluait, faisait encore deux pas, s'écroulait sur le sol derrière l'adjudant. Il y avait toujours là deux ou trois copains secourables pour l'emporter.
L'adjudant ne se retournait jamais. Pour lui, le légionnaire était rentré à l'heure et en tenue, le reste, il ne voulait pas le savoir. <<Le légionnaire boît où et quand il veut. Il n'est puni que si le service en souffre. >> Si l'homme tombait sur le parcours de dix mètres entre la porte et l'adjudant, en taule ! Le buveur sait ce qu'il risque.

Baignade dans un oued marocain
Les morts de soif
Il est impossible de ne pas parler de la boisson dès le début d'un ouvrage sur la Légion parce que le monde entier sait qu'il s'agit d'un corps comptant le plus grand nombre de morts de soif. Depuis les temps de la pénétration jusqu'à l'époque du quadrillage, sur les sables et sur les caillous des djebels et des plateaux, des légionnaires sont tombés après avoir rêvé pendant plusieurs jours d'une gorgée d'eau..
Au Maroc, au cours de la "pacification" finale, en 1933, les points d'eau étaient l'objet de combats farouches avec les tribus insoumises. Les Berbères jonchaient de leur cadavres les abords des sources battues par les rafales de mitrailleuses. Et des colonnes de légionnaires arrivaient soir après soir devant des puits vides ou comblés de cailloux et de sable par les rebelles.