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Adieu à Bel Abbès 02/13 par Georges Blond
(extrait du n° special d'Historia consacré au 150ème anniversaire de la Légion étrangère)
Cette musique qui empoigne

Face à cette musique, quatre légionnaires au garde-à-vous. Quatre. Tout autour, la place vide, personne, pas un civil.
Les quatre légionnaires quittaient Bel Abbès pour leur nouvelle garnison. Djibouti. Les tambours, les clairons, les cors, les trompettes et les fifres les avaient accompagnés à la gare, jouaient pour eux seuls, ils auraient été la même pour un seul partant ou un seul arrivant. La clique entière du régiment accueille et accompagne tout légionnaire.
Au temps où les nouveaux engagés arrivaient de la métropole, fripés, minables, risiblement fringués dans les tenues provisoires distribuées à Marseille au fort Saint-Jean, un bon nombre d'entre eux déjà écœurés par l'initiation, par la pelle et la pioche, par les gueulements de sous-officiers, par les corvées de latrines, se demandent dans quel coup de folie ils avaient signé, quelques uns déjà carrément révoltés, déjà obsédés de projets de désertion, ce troupeau fatigué, aigri, irrité, recevait en pleine face le
La clique de la Légion étrangère boulevard Général Rollet à Sidi-bel-Abbès
soufflet sonore, suffocant, à nul autre pareil, il faut avoir entendu cela de ses oreilles. Dans l'instant, on ne pouvait plus se dérober, on avait beau se répéter : <<Non, je ne veux pas, je ne veux plus >>, rien à faire, la protestation intime la plus véhémente s'étouffait.
Plus que l'engagement signé, plus que l'impossibilité physique de ficher le camp, cette musique était un coup de masse sur la volonté. Et elle était en même temps une prise à bras-le-corps, un coup de judo imparable.
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