Le tir à la carabine
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Au niveau de la Patte d’Oie sur les glacis Est, il y avait en permanence des manèges de chevaux de bois et une baraque de tir à la carabine .
Mon père, qui n'était pas chasseur, m’y a amené un jour car il devait considérer comme son devoir de m'apprendre à tirer.
Un plomb coûtait cinq centimes, et une balle vingt centimes.
J’ai donc commencé avec une carabine à plombs à trois mètres de distance sur des souris immobiles, (ce qui donnait droit à un bonbon), ou en mouvement (pour trois bonbons), ou bien encore sur des cinq ballons enfermés dans une cage.
La dame qui tenait le stand ne parlait que l'espagnol, mais comme elle m'aimait bien elle me rajoutait systématiquement un bonbon même quand je ratais ma cible. Le stand d’à côté était tenu par son mari qui ne plaisantait pas.
Ses carabines à balle étaient lourdes, le recul de leurs crosses n'épargnait pas mes frêles épaules. Leurs balles faisaient un bruit d’enfer en s’écrasant sur les plaques de tôle de la paroi du fond. J’avais le choix entre, « déquiller » une balle de ping pong qui dansait sur un jet d’eau, crever cinq ballons avec 6 balles, tirer sur des pipes de plâtre en rotation, couper une ficelle à laquelle était pendue une bouteille de mousseux, couper une attache de plâtre retenant un nounours, un oiseau, un petit drapeau, ou pour moins cher, tirer à la cible ou sur l’œil d’un pigeon en carton. Par fierté j'attendais que le stand ne soit pas trop fréquenté pour m'éviter en cas d'échec répété les sourires compatissants des adultes ou les moqueries des copains plus âgés. Ces deux baraques ont été mon école de tir avant le service militaire.