Souvenirs de Sidi Bel Abbes

"Monsieur Smahi, au tableau s'il vous plaît". Le prof, un rien pervers, vient de choisir sa proie du jour. Imperturbable, le teint sombre sur un visage étroit qui ne laisse paraître aucune émotion, ,Gogo, prenant son temps, se lève et d'un pas tranquille s'avance vers e rectangle noir, indifférent aux sourdes railleries qui bruissent sur son passage le long de la travée. Des plaisanteries, hélas, plus que douteuses mais, en ce lieu austère qui se prévaut d'un classicisme de bon ton, il faut convenir que son accoutrement relevant de la plus haute originalité y est quand même pour quelque chose. De tous ses coreligionnaires fréquentant l'établissement, il peut en effet se targuer d'être encore le seul à s'exhiber dans un folklorique saroual, ce symbole vestimentaire de la tradition berbère.
Gogo, fier comme Artaban, pas du tout incommodé par l'encombrement de son entrejambe obstruée par les larges plis de son pittoresque et anachronique vêtement, se fichait pas mal des quolibets que sa tenue insolite ne manquait pas d'inspirer.

Antoine PAVIA : Gogo 1/3
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On pouvait y voir de sa part comme une sorte de provocation, une volonté évidente en tout cas de rester fidèle à ses origines et à sa culture avec en plus, peut-être, le désir inavouable d'étaler sans concession l'image d'une pauvreté inconvenante
dans cet endroit.
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