| AVEC LES KEPIS BLANCS RUE DE LA JOIE A BEL-ABBES (rue verte) 07/13 par Marcel Carrière Reportage photo, Paul Buisson, Extrait de la revue Détective |
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Toujours seul, pas de copain, l'air triste. Buvait même pas. Toutes les copines avaient essayé de l'approcher. Gentiment, doucement, il les renvoyait : <<Niente...Non...>> J'ai essayé à mon tour. Même réponse. J'ai insisté. Toujours rien à faire. Un jour, quand même, il m'a fait signe. Il est venu dans ma chambre. <<C'est beau chez toi. >> il disait ça, moitié en italien, moitié en français, mais je comprenais quand même. Beau, chez moi ? J'avais un peu arrangé ma chambre. J'avais collé aux murs tout ce que j'avais pu trouver de photos d'artistes de cinéma. Sur le lit, il y avait une couverture marocaine, pleine de dessins et de couleurs. j'avais une carpette. Ca leur faisait plaisir, quand ce n'est pas trop sale. Il s'assied sur le bord du lit et il me regarde. J'ai l'habitude. je me dis : <<Toi, mon vieux, tu vas bientôt y aller de ta petite histoire ! <<J'attends. Rien. Je sentais qu'il voulait dire quelque chose, mais ça ne sortait pas. Enfin, dans son charabia, il m'explique ce qu'il voulait. Jamais, de ma vie, je n'avais entendu un truc pareil. Il allait partir en Indochine, et il me demandait si, de là-bas, il pourrait m'envoyer des lettres. Il m'a expliqué qu'il aimait ça, écrire des lettres d'amour. Je ne l'ai pas cru, je l'ai pris pour un cinglé. Alors il m'a avoué que sa fiancé avait été exécutée à Milan, pendant la libération de l'Italie, qu'il lui écrivait beaucoup.
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Ils n'étaient pas du même côté politique, mais ils s'aimaient. Il s'en fichait que ce soit moi ou une autre qui reçoive les lettres, pourvu qu'une femme les reçoive, les ouvre et les lise. Puisque j'étais là c'était à moi qu'il écrirait. sa fiancée s'appelait Anna. Il est parti. Pendant un an, j'ai reçu un tas de lettres. Elles étaient écrites en italien. je n'y comprenais rien. de temps en temps, quand un italien passait, je les lui montrais. Il me les traduisait. Elles étaient très jolies. Il ne parlait jamais de la guerre. Ca fait un an que je n'ai plus rien reçu..
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